Abstract
L’article examine les « compositions » de Tchernikhov en liant sa recherche constante de nouvelles formes à la capacité de convertir les « fantaisies » en représentations. Contrairement à Aristote, qui conçoit la mimèsis comme l’équivalent de l’entreprise artistique, Tchernikhov perçoit ses « compositions » comme des actes de dépassement de la mimèsis par la phantasia. Les illustrations visionnaires de ses Fantaisies architecturales expriment son intention de remplacer les mots par des images graphiques. Son approche est fondée sur la croyance que la puissance de l’imagination permet à la langue graphique, qui est par ailleurs internationale, de fonctionner comme un précurseur du progrès. L’objectif de l’article est d’élucider comment Tchernikhov traite la tension entre imagination et réalité et d’examiner dans quelle mesure sa production graphique parvient à surmonter la mimèsis à travers la phantasia. La réponse à ces questions pourrait nous aider à expliquer pourquoi Tchernikhov a souvent été jugé comme inclassable et à évaluer à quel point sa démarche reflète les polarités entre les rationalistes et les constructivistes. L’opposition entre « composition » et « construction » permet de mieux comprendre le positionnement à la fois singulier et fondamental de Tchernikov par rapport au constructivisme. L’article met en évidence le fait que le rôle essentiel de la phantasia pour Tchernikhov découle de la valorisation de la « composition » plutôt que la « construction ».