Revus 21:237-292 (
2013)
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Abstract
Le contrôle de constitutionnalité, dont la magistrature parlementaire de l’Ancien Régime revendiquait le plein droit, n’était pas fondé uniquement sur les lois fondamentales du royaume, mais sur l’ensemble des principes (« les maximes ») tirés de la « Tradition ». Cette dernière était composée en premier lieu par le droit divin et le droit naturel, c’est-à-dire par des systèmes juridiques qui nécessitaient, tous les deux, une interprétation juridictionnelle ‘sapientiale’. Cette activité interprétative était ‘révélatrice’ d’un corpus de valeurs métaphysiques à laquelle seule la Scientia Juris des magistrats pouvait puiser. Mais dans la sphère de la Tradition juridique rentraient aussi le « dépôt légal », c’est-à-dire l’ensemble de toutes les lois, même des lois ainsi dites « ordinaires », c’est-à-dire celles qui avaient été produites par la simple manifestation de volonté souveraine d’un roi prédécesseur « car tel avait été son plaisir » (moderne formulation du brocarde de droit romain : « quidquid principi placuit legis habet vigorem »). Ainsi la juridiction parlementaire donnait lieu à un jugement de constitutionnalité qui était normalement exercé de manière très flexible par le corps de la magistrature, dépendant des circonstances et des intérêts politiques momentanés des situations juridiques qu’elle voulait protéger. La hiérarchie des normes était ainsi un formidable instrument de protection de cet ordre juridique dont les legum doctores se sentaient les tuteurs. Elle était, donc, directement liée au gouvernement politique des juges